Dans les premières grammaires catégorielles (Ajdukiewicz 1935; Bar-Hillel 1953; Lambek 1958 et 1961), la notion de catégorie s'inscrit explicitement comme un prolongement mathématisé de la classique conception grammaticale en "parties du discours". Cette filiation n'est pas que théorique, puisque des tables de correspondance proposent les principales associations possibles entre catégories syntaxiques et parties du discours. Sous l'influence de Husserl, le formalisme catégoriel rompt cependant d'avec l'approche grammaticale classique en focalisant son analyse sur la distinction déjà connue des logiciens médiévaux entre parties "catégorématiques" et "syncatégorématiques". La traduction mathématique en fonction et argument, issue des travaux de Bolzano et de Frege, ouvre enfin à un traitement formalisé des parties du discours qui ne fait appel qu'à deux types de catégorie: les catégories primitives et les catégories de foncteurs.
On sait que la décomposition en "parties du discours" a essuyé des critiques nombreuses (hétérogénéité des critères mis en ouvre, absence d'organization systématique, manque d'accord sur le nombre de parties...). Sans intégrer directement ces objections, les premières grammaires catégorielles adoptent cependant une position critique qui les conduit à élaborer une approche originale de la notion de catégorie, puisqu'à la fois unifiante et hiérarchisée.
Cette communication se propose de mettre en regard les notions de catégorie et de partie du discours afin d'evaluer le changement théorique induit par une conception catégorielle de la grammaire. Le rappel des modifications conceptuelles auxquelles fut soumise la notion de catégorie permettra de comprendre comment le développement des grammaires catégorielles fit resurgir des problèmes qu'avait déjà recontrés l'analyse en partie du discours. Deux attitudes différentes en découlèrent: tandis que Lambek conservait la perspective catégorielle au prix d'une multiplication du nombre de catégories primitives, Bar-Hillel l'abandonnait au profit d'une approche transformationnelle de la syntaxe.
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